Pour vendre, il faut séduire et faire rêver!
A l’heure où les montres suisses sont toutes aussi belles et techniques, que reste-t-il au vendeur pour aider le client à construire son choix? Le talent et la passion!
Puisque, désormais, la guerre des plus beaux emplacements de vente fait rage parmi les sociétés et les groupes horlogers, il est devenu évident qu’un élément important de la victoire réside dans la qualité du personnel qui anime et gère ces très beaux magasins. Sur les cinq continents il est désormais indispensable, si l’on veut convaincre l’amateur, de lui offrir un accueil parfait, une écoute extrêmement attentive, des explications de qualité, des arguments irréfutables et, surtout, de lui donner le sentiment qu’il va pouvoir entrer dans un club ou dans un monde infiniment passionnant. Car le monde de la montre, c’est de la culture, de l’art, de la technique, de la passion, des rires, des colères, de la créativité, de l’intelligence, de l’astronomie, de la technique des matériaux. Bref y entrer en tant qu’acheteur d’un garde-temps c’est franchir une forme de porte de la connaissance.
Plus compliqué que couper des cheveux!
Quand bien même il n’est pas nécessaire d’être horloger complet pour comprendre la technique horlogère, vendre une montre mécanique est donc nettement plus compliqué que couper des cheveux ou scanner divers articles à la caisse d’une grande surface. Hélas, dans l’esprit de certains patrons horlogers ou groupes, le message n’a pas encore bien passé. Ils ont en effet une si haute image de leurs créations qu’ils pensent que les mettre en vitrine dans un bel endroit suffira à faire entrer les clients qui se précipiteront sur leurs garde-temps. Ils se trompent lourdement car, aujourd’hui, même la plus belle montre ou la plus compliquée ne se vend pas si on ne la met pas en scène.
Mais bien sûr que nous mettons nos montres en scène à travers les très onéreuses campagnes de publicité que nous organisons chaque année pour présenter nos nouveautés, disent ces marques. Il est rigoureusement exact qu’ils dépensent des fortunes en communication, quelquefois à tort d’ailleurs, mais il s’agit ici d’un autre débat. Seulement, communiquer c’est bien et cela sert surtout à pousser les amateurs à franchir la porte des magasins d’horlogerie.
Mais, même s’ils sont «des captifs consentants», les clients n’ont pas encore mis la main au porte-monnaie et, pour y arriver, il y a loin de la coupe aux lèvres.
Former, c’est investir, pas dépenser!
Dès son entrée dans la boutique, le client doit se sentir accueilli. Pour cela, il convient de lui donner le sentiment qu’il vient de franchir une porte donnant accès à un monde d’exception. Viennent ensuite tous les actes de la vente proprement dite, en passant d’abord et prioritairement par l’écoute du client, par la présentation des garde-temps, par l’explication des subtilités techniques, par la réponse aux questions de l’acheteur pour déboucher sur ce qu’il attend du vendeur, le conseil. Mais attention, quand le vendeur donne ce conseil, il ne doit pas laisser ressentir au client qu’il choisit la montre à sa place. Tout cela doit se faire avec subtilité et intelligence et le conseil est finalement une aide à la décision. Vendre des montres, ce n’est donc pas si facile.
Toutefois, ce qui est le plus difficile dans ce domaine, c’est de trouver du personnel qui connaît ce métier de manière approfondie. Oui, c’est là que le bât blesse. Durant des décennies, de nombreux patrons de magasins d’horlogerie n’ont strictement rien fait, se contentant de quitter leur partie de golf pour venir relever la caisse le samedi après-midi.
Désormais, avec une concurrence qui s’affirme de jour en jour, une telle attitude n’est plus possible. Heureusement, quelques grands professionnels de la vente de détail l’ont compris et ont permis à leurs collaborateurs d’acquérir la formation adéquate. Cela précisé, il faut reconnaître qu’ils sont une petit minorité. Cela explique aussi l’arrivée des boutiques mono-marque que les sociétés horlogères ont installées un peu partout, pour mieux présenter leur marque certes, mais également pour pallier l’amateurisme de bon nombre de détaillants. Toutefois le personnel formé est rare.
Face à cette problématique les marques horlogères poursuivent deux voies. La première, héritée du passé, leur fait confondre investissement et dépenses. En d’autres termes, elles rechignent à investir de l’argent dans la formation du personnel de vente car elles estiment que connaître quelques éléments techniques sur la montre est suffisant d’une part et, d’autre part, elles n’ont aucune envie de consacrer de l’argent à former des gens qui, lorsqu’ils le seront, risquent d’apporter leurs connaissances à des concurrents. C’est une option, mais si tout le monde avait pratiqué ainsi, la Silicone Valley n’aurait jamais vu le jour. D’ailleurs, cette attitude passéiste et stupide les conduit tout droit dans le mur!
L’autre voie, encore minoritaire hélas, consiste à consacrer des sommes importantes à la formation des collaborateurs de vente qui doivent, non seulement connaître le fonctionnement et la fabrication des montres qu’ils entendent vendre, mais aussi l’histoire horlogère et surtout la concurrence. Bien sûr leur apporter ces connaissances coûte de l’argent mais, au vu des performances de vente des vendeurs jouissant d’une solide formation, le jeu en vaut largement la chandelle. Il suffit de voir les performances que ces marques réalisent, année après année, et cela quelle que soit la conjoncture!