Richard Mille RM027

Horlogerie technique: à l’heure des matériaux légers - Part 1

Evoluant selon les technologies et des goûts du public, le métier a connu une progression en matière de porter, imposant aux montres de belle taille de se faire plus légères au fil des ans. Genèse de l’heure allégée sous forme de programme minceur.

Par Vincent Daveau
Contributeur

Comme un héritage du passé, les montres bracelets ont longtemps été considérées comme de qualité lorsqu’elles laissaient à l’amateur une sensation d’en avoir, au creux de la paume, pour son argent. Mais dans ce monde, les bonnes vieilles certitudes écrites dans le marbre sont faites pour être remises en cause..

Il y a encore une dizaine d’années, une montre, pour être reconnue comme de valeur, devait avoir un poids minimum. Alors évidemment, les journalistes ne venaient pas avec une petite balance pour prendre connaissance de leur masse, mais soupesaient les pièces pour se faire une idée la plus juste possible. Il y a dix ans encore, il fallait en avoir pour son argent et même si les montres étaient dans la majorité plus petites que celles d’aujourd’hui, elles étaient bien souvent plus lourdes, plus denses.

Tissot Astrolon - 1971 La Tissot Astrolon de 1971

Tout est un éternel recommencement

Pour faire court, on retiendra que l’idée d’alléger une montre-bracelet n’est pas nouvelle et semble être apparue à la fin des années 60, soit quelques temps avant l’arrivée des instruments électroniques qui allaient chambouler le métier et imposer d’importants sacrifices aux montres mécaniques ayant su passer le barrage de la fonctionnalité pour rester concurrentielles. En 1971, Tissot présentait l’Idea 2001, une pièce étonnante même pour l’époque, servie par un calibre en plastique translucide avec rouages colorés, connu sous le nom d’Astrolon ou sous l’acronyme de Sytal pour Système Total d’Autolubrification. Ce cœur étonnant et rare en collection se penchait sur une double problématique de taille: celle du poids et du coût de production.

La seconde entité à se poser des questions d’encombrement et, par incidence, de masse, était la maison Jean Lassale qui, entre 1976 et 1979, devait révolutionner le mode de construction d’un mouvement de montre mécanique (mono-corps et roulements à billes) et ainsi atteindre un poids minima. Cependant, l’histoire a ceci d’inexorable qu’elle est aveugle, et toutes les expériences mécaniques comme les développements innovants proposés à l’époque ont été emportés par la crise du quartz atteignant son paroxysme à la fin des années 70.

Calibre Jean Lassale Calibre Jean Lassale 1200

Pour voir en horlogerie traditionnelle de nouvelles tentatives en direction d’un allègement des montres, il faut attendre les premières années du troisième millénaire. En visionnaire et passionné de voitures de courses, Richard Mille qui venait de fonder sa marque éponyme, devait appliquer au métier des montres, les recettes automobiles. De fait, ce créateur outrepassait les codes traditionnels du métier pour séduire une clientèle lassée des montres mécaniques faisant appel à des techniques de fabrication d’un autre temps. Pour atteindre sa cible, il lui fallait donc frapper fort. Il ne suffisait pas de squeletter ou d’ajourer les mouvements pour gagner quelques grammes tout en offrant à l’œil de l’expert de plonger au cœur du mécanisme. Il ne suffisait pas non plus de travailler des matériaux légers comme le titane, l’aluminium ou le carbone forgé. Pour passer le cap des 50 grammes fatidiques sans remettre en cause la robustesse et la fonctionnalité du garde-temps, il fallait, aux ingénieurs aller au-delà des agencements connus et faire appel à des matériaux plus exotiques.

RM006 carbon nanofiber baseplate RM006 carbon nanofiber baseplate

Légère communication

Conscient des enjeux en matière de communication -un domaine dans lequel l’univers horloger ne brille pas-, Richard Mille, en fin stratège et habile communicant, présentait la RM 006 en 2004 dont le poids atteignait 42 grammes pour des mensurations très généreuses.  

Cette édition à tourbillon dotée de la première platine en titane mettait un point de départ à la guerre des grammes. L’année suivante, soit en 2005, la même maison présentait la RM 009, une référence en Alusic permettant à la tête de montre d’atteindre le poids record pour un tourbillon, de 28 grammes. En 2009, il lançait la RM007 Titalyt® et, en 2010, il présentait la RM 027, destinée au champion de Tennis Rafael Nadal. Avec cette référence incroyable, le créateur faisait la différence et arrivait avec une montre de tout juste 20 grammes, bracelet compris. Elle battait de 10 grammes la RM 009 et pesait deux fois moins que la RM 006.

Richard Mille RM 009 Richard Mille RM 009

Depuis, le maître ès futurisme a encore frappé et a présenté l’an passé la RM 27-01: une merveille ultra légère dont le calibre monté sur câble est saisissant de modernité. Aérien, il permet de réduire le poids et de protéger efficacement les composants des vibrations et chocs. De facto, cette pièce n’est pas la plus légère de l’histoire en termes absolus. Cependant, en tenant compte du rapport masse/volume, il est tout à fait admissible de lui décerner le titre de montre à tourbillon de série (même très courte) la plus légère du marché.

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