Hamilton Ventura: la révolution électrique – 1ère partie
Le 3 janvier 1957, la marque américaine Hamilton Watch Company révolutionne le secteur horloger en présentant la première montre électrique de l'histoire: la Ventura. Son design est alors futuriste, elle est aujourd’hui une icône adoubée.
L’innovation issue de 10 années de recherches est, sur le plan technologique, sans précédent! La Ventura représente une évolution majeure de l’horlogerie depuis la création de la montre mécanique. Il s’agit de la toute première montre mécanique alimentée par une pile électrique.
Mécanisme et esthétique révolutionnaires
L’énergie nécessaire au fonctionnement du mouvement n'est plus fournie par le remontage manuel au moyen d’une couronne, ou automatique avec une masse oscillante, mais par une petite batterie de format pile-bouton. Le système marque le début d’une ère nouvelle, car n'oublions pas qu'à cette époque, toutes les montres sont mécaniques. Plus besoin de remontages réguliers et fastidieux de la montre, la pile alimente le mouvement pendant une année entière.
Cette prouesse technologique de la marque Hamilton est le fruit de plus de dix années de recherches débutées en 1946, sous le nom de code de«projet X», pour mettre au point et fiabiliser le tout premier mouvement électrique. Si la Ventura est techniquement disruptive, elle l’est aussi esthétiquement avec un boîtier triangulaire, une forme unique dans la production horlogère mondiale de l’époque.
Hamilton Ventura
L’aventure Ventura, flash back
L’étude d’une montre mécanique alimentée par une pile débute en1946 sous la conduite de George Luckey, responsable «recherche & développement» chez Hamilton. L’apparition des piles miniatures ouvre de nouvelles perspectives dans de nombreux domaines en matière de miniaturisation. Deux prototypes sont conçus entre 1946 et 1952. Après plusieurs tests, Hamilton décide de développer celui présenté par Philip E. Biemiller et James H. Reese, sous le nom de «Project X». Une équipe dirigée par John Van Horn est constituée pour concevoir une montre-bracelet qui soit équipée d’une pile dont la durée de vie soit d’au moins un an.
Hamilton va développer son calibre électrique en fabriquant en interne tous les composants. A cette époque, la manufacture usinait elle-même toutes les pièces de ses montres - mouvement, cadran, aiguilles, index… - à l'exception des boîtiers.
Une des principales difficultés de la mise au point du calibre électrique a été de trouver une pile qui convienne à l’alimentation du mouvement mécanique d’une montre-bracelet. Hamilton va trouver la solution avec l’aide de la firme National Carbon Company (aujourd’huiEnergizer) qui développe une batterie spécifique.
Après la fabrication de plusieurs prototypes, un modèle de pré-série est réalisé. Le mouvement mécanique alimenté par une source d’énergie électrique vient de naître, il est enfin une réalité!
Hamilton Ventura
Succès commercial de la «montre du futur»
La «première montre électrique de l’histoire de l’horlogerie» est présentée le 3 janvier 1957 à New York lors d'une grande conférence de presse à l'hôtel Savoy Plaza, devant plus de 120 journalistes des médias internationaux. La «montre du futur» («Watch of the Future») - considérée comme la plus importante innovation horlogère depuis plusieurs siècles - va faire l’objet de centaines d’articles. Hamilton lance simultanément un second modèle électrique à boîtier rond plus conventionnel: la Van Horn. La campagne de publicité de l’époque joue autant sur la technologie révolutionnaire que sur le design original et futuriste: «It’s the perfect gift for the man who looks to the future!» («c’est le cadeau parfait pour l’homme tourné vers le futur!»).
Malheureusement, Hamilton va devoir faire face à de nombreux retours en usine après la commercialisation des premiers modèles, en raison de pannes répétées. La marque a été tellement pressée de commercialiser la Ventura après le succès de sa présentation à la presse qu’elle n’a pas pris le temps de fiabiliser totalement le mouvement de série H500. Les problèmes seront définitivement résolus en 1961 avec l’introduction du calibre H505. Malgré cela, la Ventura est un véritable succès commercial et se vendra à plus 11’500 exemplaires entre 1957 et 1963. Pensez donc! Une montre qui ne nécessite plus de remontage, c'est le nec plus ultra à l'époque et un garde-temps qu’il faut absolument avoir au poignet pour montrer qu'on est à la pointe du progrès.
Hamilton va commercialiser d’autres montres électriques dont les plus célèbres sont les Pacer, Meteor et Altair. D’autres marques horlogères, suisses, françaises, américaines et japonaises, vont également adopter la technologie électrique soit en développant leur propre mouvement soit en produisant sous licence des calibres Hamilton. Parmi eux, Ebauches SA, Lip, Timex, Tissot et d’autres…
L’arrivée du quartz bouscule la donne
1969 sonne le glas des montres mécaniques électriques avec la présentation de la première montre utilisant un oscillateur à quartz: la Seiko Quartz Astron-35SQ.
Ce garde-temps de nouvelle génération, alimenté par une pile comme la Ventura, est plus fiable, plus précis et plus robuste qu’une montre mécanique. Hamilton arrête la production de ses montres électriques cette année-là après plus de 42.000 pièces produites.
En 1970, la manufacture américaine, toujours à la pointe de l’innovation, réagit en lançant la Pulsar«qui rend obsolète la montre électrique ainsi que la montre à quartz électro-mécanique, récemment annoncée» dixit le communiqué de presse paru le 10 mai 1970 dans le New York Times. Elle est la première montre au monde sans aucune pièce en mouvement et dépourvue d’aiguilles. Mais cela est une autre histoire…