Ventes aux enchères, les marques oubliées – Part 2

Il est vrai que dans le domaine des ventes aux enchères horlogères, c’est Patek Philippe qui donne le la chez les quatre principales entreprises du secteur que sont Antiquorum, le précurseur, Sotheby’s, Christie’s ou Philips. Ses performances et ses records sont vertigineux, repoussant sans cesse les limites de l’entendement en matière de valeur au poignet. 

Signatures historiques encore prisées

La marque de Plan-Les-Ouates est au business du déjà porté horloger ce que la F1 est à la vente des voitures de tourisme. Elle dispose d’un sacrée longueur d’avance, quasiment irrattrapable. En son lointain sillage se profilent toutefois des noms d’horlogers devenus marques, ou des marques ayant laissé une trace même après l’interruption de leurs activités.

La première montre décimal, fabriquée pour le chevalier De Borda par Louis Berthoud, le neveu de Ferdinand. ©Antiquorum

Certains, et c’est peut-être lié, sont même en plein processus de réincarnation dans une aventure entrepreneuriale moderne, après s’être éteints soit par absence d’héritiers, soit en raison simplement de malchances commerciales. 

> Ferdinand Berthoud (1727-1807) était l’un d’eux. Horloger-chronométrier suisse, disciple de Julien Le Roy, pionnier de la chronométrie de marine, il sévit en France et en Angleterre. Son talent, exprimé au fil d’une production confidentielle, est encore célébré lors des ventes aux enchères. Dégoter l’une de ses montres de poche relève du fantasme enchérisseur.

Ferdinand Berthoud

Soudain, courant 2015, la maison Chopard et son co-Président Karl-Friedrich Scheufele décident de redonner vie à cet illustre personnage profondément lié au Val de Travers. C’est d’ailleurs là, pas très loin de la manufacture L.U.C que s’est installée cette renaissance.

La marque Ferdinand Berthoud a présenté en 2015 le nouveau Chronomètre FB1

> Julien Le Roy (1686-1759) était un spécialiste des montres à répétitions, un apporteur exceptionnel d’innovations techniques. Son fils Pierre Le Roy (1717-1785), sera le pionnier de la chronométrie de marine en France. Ses inventions, particulièrement tournée sur le système balancier et le spiral font que ses pièces, encore aujourd’hui, fascinent.

Julien Le Roy, montre de poche à répétition des quarts avec décor émaillé ©Antiquorum

Quant à Louis Leroy (1860-1935), il crée la célèbre Leroy 01, la montre la plus compliquée du monde à l’époque (Musée du Temps à Besançon). Encore aujourd’hui, en marge d’une production initiée d’abord en France puis relocalisée en Suisse, ce nom fait glousser d’aise les collectionneurs. 

La montre "Leroy 01", a conservé son titre de « montre la plus compliquée du monde » jusqu’en 1989. © Collection Musée du Temps

> Henri Grandjean (1803-1879) fonde avec Louis Berthoud et Ulysse Nardin une sorte de centrale de production entièrement vouée aux chronomètres de marine. Réputé dans la fabrication de montres de poche de précision, de chronomètres de marine ainsi que de montres à grande et petite sonneries.

Henri Grandjean, très rare montre de poche répétition minutes fabriquée dans les années 1880. © Antiquorum

> Franciszek Czapek (1811-?). Cet horloger polonais naît en 1811, il arrive à Genève en juillet 1832. Deux ans après, en 1934, il fonde avec un horloger suisse de Versoix sa première société, Czapek & Moreau. Il se marie à Marie, la fille du pendulier et horloger Jonas Pierre François Gevril de Carouge (1777–1854).

Czapek & Cie, la de poche ancienne qui a inspiré le renouveau de marque ©Antiquorum

En 1939, il s'associe à un autre Polonais, comme lui réfugié en Suisse, Antoine Norbert de Patek. Sous la raison sociale PATEK, CZAPEK & CIE, leur société durera six ans. Une année après sa création, elle emploie une demi-douzaine de collaborateurs. Environ 200 montres seront produite annuellement. Ces montres sont aujourd'hui très recherchées et une poignée de grands collectionneurs, de ceux qui font la tendance sur le plan mondial, en possède au moins un exemplaire.

Czapek & Cie, très rare porte-monnaie en or et émail avec montre dissimulée. ©Antiquorum

Après la dissolution de leur société, Patek aura besoin d'un autre grand horloger comme partenaire et s'associera avec Adrien Philippe pour devenir Patek, Philippe & Cie. De son côté, Czapeck, l'horloger aux clients prestigieux, créera une nouvelle entité, Czapek & Cie avec un partenaire du nom de Juliusz Gruzewski.

Quelques chères disaprues

Avec l’arrivée du quartz qui orchestrera la crise la plus terrible de l’industrie horlogère suisse, de nombreuses marques disparurent ou durent cesser d’exister, malgré pourtant de significatives notoriétés sur les marchés mondiaux. Nombre d’entre elles ressortent régulièrement ici ou là sur les sites internet ou dans les fonds de tiroirs d’horlogeries bijouteries anciennes.

> Gruen était réputée pour ses mouvements Curvex «incurvés» d’extrême qualité. La marque, est créée en 1874 à Colombus aux Etats-Unis, par Dietrich Gruen, un Allemand ayant travaillé en Suisse. En 1903, l’entreprise crée à Bienne la ‘Gruen Watch Manufactoring & Co’, vouée à la fabrication de ses mouvements, les boîtes étant faites aux States, en raison du coût plus avantageux de l’acier.

Gruen, montre de plongée des années 1960 

> Angelus fut créée au Locle en 1891 par Gustave Stolz (1872-1942). Elle disparut avant les années 80. Réputée pour sa production de quantièmes – un calendrier sur 60 ans, indiquant les mois, pour ses chronographes et ses montres réveil. 

Angelus, le fameux Chronodato des années 1940 ©Phillips

Sur leur cadran, les lettres « SF » signifient Stolz Frères, le nom de la manufacture. On trouve encore quelques modèles à des prix qui resteront abordables tant qu’un historien éclairé n’aura pas titillé l’appétit immodéré d’un enchérisseur visionnaire.

> A vos marques! Des marques telles que Gruen ou Angelus, l’histoire horlogère en regorge. Merci de bien vouloir nous les signaler afin de compléter ce voyage en territoires vintage.