Tiffany & Co: créer une question de principe des années 1980 à 2015
La puissance de Tiffany & Co tient à cette faculté qu’a cette maison de toujours sentir poindre la tendance. En fonction des époques et de ses besoins, elle a par conséquent sélectionné les produits horlogers chez les plus grands ou a proposé sa propre vision du temps.
Par Vincent Daveau
Contributeur
De sa fondation en 1837 aux années 1930 -soit pratiquement pendant un siècle-, la maison Tiffany a proposé ses propres montres (mouvements et boîtes, puis boîtes seulement) en plus d’une sélection de produits horlogers en provenance des plus grandes maisons. Seulement, la mutation de la montre de poche – une grande spécialité de la maison - à la montre-bracelet, a incité la Direction de la société à recentrer son activité sur le secteur joaillier et sur celui de l’argenterie, alors en pleine croissance.
La maison Tiffany était évidemment consciente qu’il était difficile dans un marché devenu ultra concurrentiel, de rivaliser avec quelques poids lourds du métier.
Qui plus est, forte de ses accords de distribution lui étant très favorables, elle allait recentrer ses activités pour produire des montres plus joaillières avec talent, mais aussi sélectionner parmi les collections des nombreuses maisons alors en activité, le meilleur des pièces de fine horlogerie à destination d’une clientèle qu’elle avait l’avantage à la fois de fort bien connaître, et à qui elle avait fait le choix de proposer toujours le meilleur.
Si dans les années 70, Tiffany & Co avait cédé à la tentation du quartz et ouvert ses vitrines à des produits aussi étonnants que les Pulsar dont certaines étaient même en or, elle saisissait à l’aube des années 1980 que ce type de modèles devenus bas de gamme ne suffirait plus longtemps à séduire sa prestigieuse clientèle toujours en quête d’exceptionnel. Seulement, la raréfaction des maisons ou leur incapacité à livrer des instruments de qualité en raison de la crise qui frappait alors le métier (crise du quartz et effondrement du marché entre 1976 et 1983) devait inciter Tiffany & Co à relancer des collections de montres intégralement dessinées et mises au point par ses soins.
Les premières, intensément classiques, ont été suivies par d’autres pièces plus pointues qui, dès 1981, étaient proposées sur des bracelets en caoutchouc.
En 1982, Tiffany & Co osait avec plus de 20 ans d’avance, séduire sa clientèle avec des références horlogères dotées de boîtiers et de bracelets noirs. L’excellente réception de ses collections devait encourager la marque à lancer des gammes qui ne soient plus des itérations de modèles suisses, mais des créations développées à partir d’un cahier des charges purement américain.
De cette réflexion globale devait naître la fabuleuse collection Atlas. Sobre, efficace et visuellement reconnaissable, cette ligne introduite en 1983 avait tout pour séduire puisqu’elle correspondait aux critères principaux de choix de cette clientèle choyée par Tiffany & Co. Sa réussite a, comme on s’en doute, incité Tiffany & Co à proposer de nouvelles séries au fil des années. Parmi les plus représentatives, on retient la Tesoro puis, dans les années 1990 la Streamerica (conçue pour célébrer les 50 ans de la boutique de la 5ème Avenue à New York ainsi que le Flagship de la 57ème rue construits dans le style des années 1930-40). Les instruments au dessin évoquant un DC3, l’avion mythique des années 30-40, devaient donner ses lettres de noblesse à l’acier inoxydable par un traitement très soigné des boîtiers. Dans la foulée, la ligne Intaglio était dévoilée en 1992.
Suivaient bien d’autres modèles tandis que les pages du «Blue Book» ont continué de présenter les plus belles références des plus grandes maisons qui, durant les dix ans qu’ont duré la crise horlogère suisse (1980-1990), ont eu la chance de profiter de la puissance commerciale de Tiffany & Co. Mais, de toutes, la plus proche de Tiffany & Co n’est autre que la manufacture Patek Philippe avec qui elle célébrait en 2001, les 150 ans de leur fantastique collaboration par la mise au point d’une montre exclusivement produite pour être distribuée par l’enseigne américaine.
En 2005, la collection Grand Watch était lancée et déclinait avec des accents d’une modernité bienvenue, des volumes inspirés de designs horlogers datant des années 40. Dans le même temps, un certain nombre de montres de cocktail serties de diamants devaient être éditées. En 2011, il semblait important pour Tiffany d’élargir encore son offre en enrichissant l’incroyable et incontournable collection Atlas à travers la création d’une version chic, en or sertie de diamants.
