Ces femmes qui nous volent nos complications!
D’après les marques, les femmes s’intéresseraient enfin aux complications. S’approprieront-elles aussi ces joujous mécaniques jusque-là réservés aux hommes? Les horlogers aimeraient nous en convaincre…
De tous temps, certaines femmes ont aimé porter des montres d’homme. Celles héritées d’un père disparu ou celles, piquées au conjoint, histoire de lui rappeler que l’absence de rangement comporte des risques! Pourtant, l’égalité dans ce domaine n’a jamais été le fort des horlogers. Jusqu’ici, les montres dame n’étaient que des réductions de formats masculins, avec, pour marquer la différence, quelque effort côté design ou empierrage. Diamants et pierres précieuses ne sont-ils pas leurs meilleurs amis? Et comme les femmes détestaient les contraintes futiles, autant que ces montres fonctionnassent au quartz. Tellement plus pratique, un changement de pile tous les 2 à 5 ans!
Il n’en a pas toujours été ainsi. Indirectement, durant plus de deux siècles, les femmes ont inspiré bon nombre de grands horlogers; des clientes particulières pour qui fabriquer une pièce unique faisait partie des mœurs.
La réduire à son maximum, la rendre plus plate ou moins visible au regard extérieur, pour plus d’élégance, titilla donc l’inventivité des maîtres d’alors, leur arrachant là une prouesse technique, ici un trait de génie inventif. Elena Stefanova, à la fois historienne de l’Art et Directrice de production en horlogerie, est formelle: l’histoire de l’horlogerie compliquée doit énormément aux femmes. Elle en fit une conférence mémorable lors d’un congrès de la Société Suisse de Chronométrie.
Son nom l’indique, elle s’adresse aussi aux femmes malgré ses 43 mm de diamètre. Modèle tourbillon à l’esthétique contemporaine, son allure all black tranche avec le rose de son or. Concentré d’exigences haute horlogerie, marque de niche.
Or donc, soudainement, les femmes s’amouracheraient des fines mécaniques horlogères. Complications, mot fémini pluriel, retour à l’envoyeuse? Encore en 2014, la tendance amorcée il y a peu est perceptible. Chaque enseigne y va de sa complication spécifiquement conçue et développée pour les femmes. Parfois même par des femmes, comme chez Cartier Manufacture où Carole Forestier-Kasapi, la responsable ès calibres, supervise tout développement.
Face à un si soudain engouement, ma mauvaise langue se hasarde à un autre son de cloche: et si plutôt c’était le marché asiatique, immense réservoir de poignets plus fins que les nôtres, qui avait carrément réorienté la mode?
Adieu les tailles XXL, retour aux classicisme parfois zesté neo vintage. Quant aux pierres précieuses, figurez-vous que les hommes de là-bas les portent aussi. Puisqu’il faut que ces modèles trouvent aussi preneurs de côté-ci de l’hémisphère, autant marteler qu’ils ont été conçus spécialement pour vous, Mesdames. Sans voir le mâle partout, il se pourrait bien que vous soyez tombées une fois de plus dans le panneau…