Bart Tim Grönefeld

Entretien avec les frères Grönefeld, horlogers

Ils sont le nom qui monte de l’horlogerie néerlandaise. Ils font partie des meilleurs horlogers indépendants, comme le prouve leur nomination dans la catégorie Montre Hommes du prochain GPHG 2016 et leur présence au SIHH 2017.

Par Benjamin Teisseire
Contributeur

La magie de Skype m’a permis de les croiser dans le calme de l’atelier de leur grand-père à Oldenzaal. Bart et Tim Grönefeld sont espiègles, directs et authentiques. Pas d’envolées lyriques ni de «story-telling», pas de marketing enjolivé. Droit au but, concentrés et obsessionnels sur la qualité. Jugez par vous-même.

Racontez-nous vos débuts.
Nous avons débuté comme horlogers purs sans aucune notion de marketing. Nous avons voulu faire un beau garde-temps et c’est tout. Nous attendions les acheteurs près du téléphone…on ne peut pas dire que nous étions débordés par les appels! La presse horlogère nous a donné notre première visibilité internationale. Puis nous avons participé à la Foire de Bâle en 2009… Mais, inconnus, nous avons eu très peu de visiteurs. La deuxième année nous avons commencé sur Facebook. Cela a été décisif pour construire la notoriété de la marque Grönefeld.

Grönefeld Remontoire 1941 Constant Force Grönefeld Remontoire 1941 Constant Force

Comment vous êtes vous développés ensuite?
Nous visons les collectionneurs et entrons en contact avec eux à travers les forums. (…) Nous avons même fait des ventes en rencontrant des gens par Facebook puis en les contactant directement. Nous avons réussi à avoir quelques magasins qui nous distribuent mais les ventes n’étaient pas bonnes. Il faut 10 ans pour asseoir une marque, nous sommes donc encore très jeunes, mais notre notoriété est déjà assez impressionnante auprès des collectionneurs.

Du côté des magasins qui vous distribuent, comment cela se passe-t-il?
Dans le retail, il faut tout faire soi-même: la formation du personnel de vente, les événements spéciaux. Mais les ventes ne se font réellement que lorsque nous sommes présents. Les collectionneurs veulent voir à qui ils achètent, ce qu’il y a exactement dans les montres et les créateurs sont toujours les meilleurs pour promouvoir leurs créations. On peut faire toutes les formations possibles. C’est important, mais cela se traduit rarement par des ventes. Honnêtement, la plupart du temps, les personnes intéressées par nos montres nous contactent directement pour toutes leurs questions. Elles vont ensuite en magasin juste pour récupérer leur garde-temps.

Grönefeld Remontoire 1941 Constant Force Grönefeld Remontoire 1941 Constant Force

Vous vendez donc de plus en plus en direct?
Nous vendons en direct là où nous n’avons pas de distributeurs. Mais c’est assez important: près de 30% et cela se développe. Cependant les collectionneurs sont aussi très loyaux envers leurs magasins et demandent à passer par eux. Les Japonais en sont un excellent exemple: ils n’achètent quasiment jamais en direct.

Grönefeld attire de plus en plus l’attention en ce moment. En quoi êtes-vous si spéciaux?
Nous sommes deux frères avec une vision: rechercher des solutions techniques qui mettent toujours en lumière les complications. Nous les rendons toujours visibles pour que les aficionados puissent apprécier le résultat. Nos montres sont comme des expositions d’art. Notre tourbillon à répétition minute exhibe ses marteaux sur le devant avec le tourbillon. La cage de tourbillon est élevée au maximum pour en accroitre la vision. La One Hertz, notre deuxième montre, expose sa seconde morte le plus près possible de la glace saphir pour un meilleur effet. Notre Remontoire 1941 dévoile son «gouverneur» régulateur de vitesse (garantissant un échappement à force constante, ndlr) dans une ouverture sur le cadran à 9 heures, permettant à son propriétaire de profiter de ce spectacle permanent.

Gronefeld movement calibre G-05 Grönefeld movement calibre G-05

Qu’en est-il des calibres? Quelles sont les spécificités Grönefeld?
Côté mouvement, notre ADN est vraiment révélé par l’utilisation de l’acier (matière très dure à travailler) pour les ponts et des chatons en or. Nous déconstruisons le calibre avec un pont pour chaque roue. Leurs bordures sont surélevées, anglées et polies à la main alors que la surface intérieure est dépolie pour créer un contraste spécifique. C’est notre interprétation de l’horlogerie hollandaise. C’est notre propre style.

Combien produisez-vous par an?
L’année dernière 25 Tourbillons Parallalax. Avec le Remontoire 1941, nous espérons atteindre 50 montres. Nous avons une équipe de 11 horlogers, ce qui est assez faible compte tenu de la technicité de nos garde-temps. Nous visons 100 montres mais ne pensons pas réussir à produire de la même façon 500 montres ou plus. La quantité de travail sur chaque pièce, le niveau de qualité des finitions ne peut rester le même avec des gros volumes.

Faites-vous vos mouvements vous-mêmes? Vous considérez-vous Grönefeld comme des montres Swiss Made or comme un horloger hollandais?
Notre premier tourbillon avait un mouvement Christophe Claret,mais c’était avant que la crise frappe l’industrie. Maintenant les collectionneurs sont conscients de la véritable valeur et recherchent des choses vraiment spéciales. Nous avons donc tout changé pour la One Hertz. Nous avons créer notre propre mouvement, ce fut véritablement la (re)naissance du style Grönefeld.  Nous ne produisons pas tous les composants en interne et nous nous approvisionnons auprès de fournisseurs suisses. Le design du Parallalax et de One Hertz ont été faits en collaboration avec Renaud & Papi (Audemars Piguet), pour qui nous avons longtemps travaillé par le passé. Le Remontoire 1941 a été développé avec Andreas Strehler, un autre horloger indépendant réputé. Nous ne sommes pas Swiss Made mais tous nos composants viennent de Suisse. Ils sont finis et assemblés en Hollande. C’est une garantie de qualté pour nous et nous clients. Mais nous nous considérons comme les horlogers hollandais que nous sommes.

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