Répétition Minutes: le juste ton sur ses origines
Toutes les civilisations ont fait du temps sonné une prérogative absolue des institutions civiles ou religieuses. Voilà pourquoi disposer des moyens de le faire en réduction confère à son propriétaire une dimension particulière.
Cette prérogative explique également sans doute le caractère envoûtant que revêt cette complication horlogère auprès des collectionneurs. Toutefois son évocation soulève deux questions: celle de savoir qui en a été l’inventeur et quelles ont été les raisons qui ont bien pu pousser les horlogers à fabriquer d’aussi complexes instruments permettant de sonner l’heure. Voici quelques pistes de réflexions.
Les origines des Répétition Minutes
On rapporte que la plus ancienne montre à répétition minutes connue à ce jour serait une pièce réalisée à Friedberg, en Allemagne, vers 1710.
Pour les autres, dont les ouvrages font autorité dans le monde horloger, l’invention de la montre à répétition reviendrait à un horloger anglais du nom de Daniel Quare (1649-1724). Pareille innovation dont on devine l’intérêt qu’elle suscitait auprès des élites, ne devait pas tarder à être améliorée. Il se dit également que Thomas Mudge (1715-1794), élève de George Graham, contemporain de John Harrison et surtout connu pour être l’inventeur de l’échappement à ancre, aurait créé une montre à répétition minutes. Sensiblement amélioré, ce mécanisme d’une grande complexité devait encore évoluer avec la mise au point par le grand Abraham-Louis Breguet, de timbres fil permettant, grâce à leur finesse et leur placement à la périphérie du mouvement, de réduire considérablement l’épaisseur des boîtes et offrant, par effet, à ces instruments de pouvoir coller parfaitement à la mode de leur temps, et donc de toujours rester au fait de la tendance.
La voix du pouvoir
En matière de répétition minutes tout a été écrit ou presque quant à ses origines. Et la plupart de ces origines sont folkloriques et fantaisistes. Des auteurs, sans doute connaisseurs dans l’art mécanique mais peu versés dans les sciences sociales et les valeurs fondatrices du Siècle des Lumières pensent encore que les montres à Répétitions Minutes servaient – faute d’avoir inventé les aiguilles luminescentes- à informer leurs propriétaires de l’heure, une fois la nuit venue.
Humoristiques, ces allégations font abstraction des us et coutumes du passé. Autrefois, un homme susceptible de posséder une montre à répétition, ne dormait pas comme on le fait aujourd’hui. Il le faisait tout d’abord en position semi-assise et sa chambre était habituellement baignée par la lumière d’une bougie ou d’une chandelle (en fonction des revenus) que l’on appelait veilleuse, et qui se trouvait à quelques distances du couchage.
Egalement, l’absence de table de chevet et de lumière, si elle avait manqué, aurait imposé au propriétaire du précieux garde-temps à se déplacer dans l’obscurité (au risque de casser la montre en la cherchant à tâtons) pour connaître une heure qu’il pouvait entendre, grâce aux différents cartels se trouvant dans sa maison.
Non, l’intérêt pour les montres à répétition minutes est bien plus rationnel. Ces instruments complexes à fabriquer sont la transposition à une échelle réduite d’une prérogative réservée aux institutions politiques et religieuses. En effet, la matérialisation du temps et le séquençage de la journée grâce à l’emploi de sons est, depuis l’Antiquité, l’expression physique de l’emprise du pouvoir civil ou religieux sur les populations. Par incidence, tous les moyens susceptibles de dire l’heure d’une façon sonore est intuitivement considéré comme un symbole de pouvoir.
Longtemps, on a également cru la sonnerie un moyen discret d’avoir l’heure en bonne société. Il n’en est rien car les horlogers avaient mis au point des montres disposant de mécanismes permettant d’avoir l’heure par vibrations (montres à toc) ou grâce au toucher comme cela se fait pour les montres d’aveugle (montres à Tact). Non, la sonnerie, hier comme aujourd’hui, devait être audible par le plus grand nombre et il devait être plaisant pour son propriétaire de la faire entendre à un large public dans les salons et boudoirs de jeu. Les notes se révélaient alors l’expression d’un ennui, d’un niveau de fortune ou celle du désir de faire converger l’attention à soi. De fait, les motivations d’hier ne sont pas tant différentes de celles d’aujourd’hui lorsqu’il s’agit d’acquérir une pièce de cette sorte.
Appréciation sonore
On retiendra que la qualité d’un son est une valeur pratiquement universelle et qu’en matière de note, l’oreille ne supporte pratiquement jamais l’à peu près. Voilà pourquoi la richesse des notes employées est essentielle.
Elle concoure très largement à l’appréciation. Pour cette raison, une montre à répétition minutes est bien plus qu’un bel assemblage mécanique.