C2 Automatic Chronograph GraffitiGrey Y-12 Limited Edition
C2-GraffitiGrey par Watchonista
D’habitude, pour faire rêver, on positionne une montre au poignet d’un sportif, d’une star de cinéma ou d’un pilote de course. Si cela semble être un gage d'efficacité auprès d'un public de non-initiés, les connaisseurs, eux, s’en gaussent.
Par Malik Bahri
C’est avec un grand étonnement teinté d’admiration, que j’ai découvert la nouvelle campagne de communication de Concord pour le lancement de la nouvelle C2, que l’on attendait plus.
C’est donc une réelle (bonne) surprise à tous points de vue.
Tout d’abord, la communication. Après une campagne digne de "Transformers 4" pour le lancement de la Blackspider, Concord tape encore plus fort avec une campagne sur la thématique du « Street Art » pour le lancement de la C2 Graffiti. Des happenings « Street Art » ont été organisés à Paris, Milan & Londres dans des squats entièrement tagués. Un choc culturel quand, à force de s’ennuyer, on subit les raouts horlogers organisés dans des adresses « prestigieuses ».
Selon les critères traditionnels de la communication horlogère, on se mouille quand il pleut. Ici, c’est exactement l’inverse, Concord s’approprie une thématique sulfureuse selon les critères de la com’ horlogère.
En soit, la peinture murale spontanée n’est pas nouvelle dans l’histoire de l’humanité; cela a sans doute été, avec la gravure, la première forme d’expression. Les peintres de la fabuleuse grotte de Lascaux étaient peut-être des délinquants juvéniles à casquette (en peau de mammouth) de la préhistoire…
Le tag, le graph, la salissure, les fresques, les slogans sont présent tout au long de l’histoire humaine; ils sont tantôt politiques, tantôt trollesques, souvent amusants. Avec leur insatiable soif de communication, les humains on souvent posé des messages lapidaires sur les murs.
Après une période très politique dans les années 60’, où il se voulait révolutionnaire, le graffiti s’est progressivement mué en art de rue dans les années 70, via les noirs américains du Bronx. Phénomène paradoxal, c’était ces damnés de la terre, qui avaient le plus à revendiquer, qui préférèrent s’évader à travers l’art plutôt que d’en faire un support de complainte.
Ainsi, sous l’impulsion de la culture Hip-Hop, le Graph a magnifié la misère via des techniques aux influences variées, du surréalisme allemand à la calligraphie japonaise.
Ultime ironie, les fresques habillent le paysage urbain. Lors d’un pénible trajet en RER, alors qu'on cherche à s’échapper de la grisaille ambiante, un beau Graph donne une touche de vie à ce paysage de béton armé.
Ce qui est particulièrement intéressant avec la thématique de cette C2 Graffiti, c’est qu'il s'agit probablement de la première montre rendant un hommage aussi appuyé aux milieux urbains. Alors que la majorité des clients de l'horlogerie de luxe vivent dans des mégalopoles, le storytelling classique de l’horlogerie met toujours en scène un bucolisme magnifique, mais peu en phase avec la réalité.
L’autre question soulevée par cette montre est celle du luxe en 2012. Les codes du luxe ont en fait complètement explosé. Quand on croise les grands collectionneurs Italiens aux enchères Genevoises, ils portent du sportswear, jeans, baskets et veston pour les plus élégants, seule la chemise a encore la vie dure…
Les vigiles de Securitas sont nettement mieux habillés, tout au moins selon les critères « classiques ». Pourtant, ils ne portent pas ces rarissimes Patek à plusieurs millions…. Pareillement, le succès de montres néo-vintage militaires, comme les Panerai, marque un glissement des codes du luxe.
Bref, le luxe n’est plus là où on pouvait le supposer, car actuellement ce marché se repositionne pour occuper toutes les niches stylistiques vacantes… Quelqu’un propose enfin une montre totalement dédiée aux univers urbains.
Le boitier de cette C2 Graffiti est une évolution profonde de celui de la Concord C1… La C1 Blackspider en marquait les prémices. Avec la C2, le mariage du sport chic et du streetwear est consommé !
En fait, la meilleure définition de l’esthétique de cette montre est qu'il s'agit de sport-chic modéré par du cyberpunk….
La lunette est particulièrement réussie: la rencontre à priori improbable entre cette lunette lisse et son rebord crénelé fonctionne à merveille.
De même, les « cornes » semblent empruntées à un pont suspendu. En plus d’être sympa, c’est pratique, cela facilite grandement le changement de bracelet ; par exemple un matin ou le ne doit pas rater son train de banlieue.
Le boitier en acier PVD fait 43mm sur 12.75mm (en photo à l’état de prototype) et le mouvement est un Valjoux avec un plateau de complication chronographe. Mais si le boitier a beaucoup de style, l’innovation n’est pas à chercher ici.
La principale innovation est esthétique : la C2 se fond dans le décor urbain. A l’inverse d’une montre clinquante, cette Concord représente la furtivité ultime ; c'est plus qu'un « all black », qui pourrait trancher dans la grisaille urbaine, c'est un gris intégral ton sur ton; l’ultime évolution pourrait être un habillage « digi-camo » urbain.
Toujours pour favoriser la furtivité (mais la favorise-t-il vraiment au final ?), le verre de la montre est fumé et évoque un peu le vitrage des tours de bureau; disons-le sans détour, si c’est d'esprit très urbain et très original, ça nuit fortement à la lisibilité.
Ce qui est certain c’est qu’il y a aucune chance que vos voisins de métro puissent lire l’heure ou la marque de la montre par-dessus votre épaule, c’est l’anti montre « Show Off », la montre « Show In » en quelque sorte. Dans un certain sens, on n’en revient même aux fondamentaux calvinistes de l’horlogerie classiques: Une montre efficace, sans ostentation.
Cette montre est donc l’une des plus grosses surprises de la rentrée 2012, elle bouscule beaucoup de codes, tant esthétiques que communicatifs. Une parfaite compréhension du « Zeitgeist », une pièce que l’on attendait depuis longtemps.
