Les nouveaux du bloc des indépendants
Les marques horlogères indépendantes plaisent pour leur créativité, leur différence et leur côté humain aussi rare qu’appréciable. On peut s’approprier leur histoire, craquer pour leur design et affirmer ainsi sa propre identité. Elles sont nombreuses et variées. C’est ce qui fait leur attrait. Petit tour d’horizon des nouveautés notables de Baselworld.
Triton, renaissance d’une plongeuse mythique
C’est la passion pour les plongeuses hors-normes de Philippe Friedmann et Jean-Sébastien Coste qui a fait renaître cette icône du monde du silence. En 1963, la Triton Spirotechnique était LA montre des professionnels de la plongée. Elle était la plus chère du marché et offrait une qualité robuste et un comfort incomparable. La nouvelle Triton Subphotique est en tous points sa digne héritière. Sa couronne vissée et son protège-couronne reconnaissable entre tous sont toujours là, à 12 heures. Sa qualité supérieure aussi avec son étanchéité à 500m et sa valve à hélium.
Son confort est optimisé par des bracelets doublés de tissu synthétique gomme cousu sur caoutchouc noir avec une boucle ardillon ou en acier brossé, développé sur mesure, avec boucle déployante double poussoir. Sa couronne finement crantée de 60 dents, ultra maniable même avec des gants de plongée, est rehaussée de Superluminova C3 pour une lisibilité parfaite. Un calibre Soprod M100 de très haute qualité, personnalisé Triton, anime cette petite merveille de plongeuse. Elle se décline à Baselworld en deux éditions limitées à 63 exemplaires chacune. Un cadran vert kaki sur bracelet Nato en hommage à son passé militaire pour la Navy Green Triple Black; un cadran noir mat avec boîtier acier et bracelet tissu noir pour un look ‘dark chic’ sur la Sport Black Redline. Il n’y en aura pas pour tout le monde…surtout à moins de CHF 5000! C’est beau la passion quand elle produit des garde-temps distinctifs, robustes, fiables et abordables au style inimitable.
Reservoir, le Swiss Made à la française
Quand un concept fort, porté par une équipe d’entrepreneurs compétents, rencontre la qualité suisse horlogère, cela donne Reservoir. Des passionnés d’instruments de mesure anciens ont eu la volonté de les porter au poignet. Ils créent un affichage de l’heure à l’esthétique résolument différente qui reprend les fonctionnalités de compteurs vintage : compte-tours, jauge d’essence, compteurs kilométriques. On retrouve tous les codes chers aux aficionados dans 43mm. Ils combinent intelligemment 3 complications horlogères.
Un affichage rétrograde des minutes à 240° sur la partie haute du cadran évoque un manomètre. Un guichet central très lisible égrène les heures sautantes comme autant de kilomètres. Une réserve de marche à 6 heures s’inspire des jauges d’huile ou de carburant pour prévenir tout risque de ‘rester en rade’. C’est clair, efficace, fonctionnel. Le calibre de base est l’ultra-robuste ETA 2824-2 pour une fiabilité à toutes épreuves auquel se joint un module propriétaire de 124 composants créé pour la marque et breveté. La jeune marque, née en 2016, sort un nouveau modèle, inspiré cette fois-ci de la Mini Cooper et ses cadrans immédiatement reconnaissables, la Longbridge en 39mmm. Ces cadrans, déclinés en vert anglais, noir ou blanc crème bi-tons, offrent un travail très élégant de textures et de volumes. On est dans le chic racé avec des finitions satinées et des petits détails qui font la différence comme ces cabochons en pierres précieuses rappelant les diodes des compteurs emblématiques.
Pour moins de CHF 4000, Reservoir créent de beaux garde-temps au style affirmé, sportifs et chics. Coup de coeur pour la Longbridge British Racing.
MONTA Watch, les US au top du Swiss Made
Inspirée des montres des années 50-60, MONTA Watch est une jeune marque créée par des passionnés américains : Michael DiMartini, David Barnes et Justin Kraudel. Ensemble ils ont décidé de faire revivre l’esprit des vraies ‘tool watches’ avec leur beauté classique, leur utilité réelle, leur fiabilité légendaire et surtout un prix abordable bien en-dessous de la valeur perçue. Leur nouvelle Oceanking présentée à Baselworld 2018 en est le meilleur exemple. Elle a tout d’une grande plongeuse ! Un look résolument classique et élégant avec ses cadrans noirs mats ou laqués, bleu soleillé ou bleu nuit MONTA, son rehaut fin, ses index appliqués, ses aiguilles ‘épée’ rhodiées et son Luminova suisse BG W9.
Un calibre à remontage automatique Sellita SW300, certifié chronomètre suisse, lui assure fiabilité et robustesse pour 42 heures de réserve de marche. Elle est étanche à 1000 pieds (304m) et sera donc aussi à son aise dans les grandes profondeurs qu’en société. Mais ce sont les petits détails qui font la différence comme la lunette en céramique et ses index luminescents ultra-lisibles ou les protège-couronne finement profilés. Et surtout son confort et son niveau de finitions, qualités rares à ce niveau de prix.
Les surfaces du boîtier en acier 316L de 40,7mm sont polies ou brossées; les maillons articulés du bracelet sont anglés et polis pour un confort optimal qui viendra épouser délicatement toutes les tailles de poignets grâce à une extension ajustable de la fermeture; la couronne est ornée du logo gravé très ‘vintage’ de la marque. La distribution se fait uniquement à travers leur site ce qui permet un prix très agressif : USD 1.730,00 en prévente pour une livraison en Août 2018 avec en prime un second bracelet NATO inclus pour un total look vintage !
L&Jr, une nouvelle aventure horlogère
Une fois n’est pas coutume, le quartz est à l’honneur avec cette nouvelle marque. Qui a dit que le quartz devait être ennuyeux? Trois esprits entrepreneurs, créatifs et experts de l’industrie horlogère lancent cette nouvelle marque pour proposer des garde-temps sophistiqués et abordables: Philippe Cros à la production, Jörg Hysek Jr et son réseau pour la distribution et la promotion, Lionel Ladoire pour le design. Le résultat est plus que probant avec une première collection, Step 1, en deux lignes aux complications utiles : day-date et chronographe.
Le design est bluffant, complexe, distinctif et haut-de-gamme. Les différents niveaux du cadran donnent une profondeur élégante et moderne. L’offre se décline en trois thèmes : blanc, noir ou noir et gris. On obtient des montres à la forte personnalité avec leur dôme en saphir bombé et leur boîtier de 45mm. Les cornes plongeantes et cintrées, partiellement ajourées, accentuent le look ‘graphique’ et technique alors que les finitions alternées brossées et polies, ainsi que les fines cannelures entre la lunette et le bord de la boîte, confèrent une touche d’élégance indéniable. Du beau travail, actionné par un mouvement Quartz suisse. Surtout pour des prix allant de 1.180 CHF à 1.480 CHF. Ils parlent déjà de lancer des modèles mécaniques vu les nombreuses demandes qu’ils ont reçues. Une marque à suivre de près.
Hajime Asaoka, l’horloger philosophe japonais
Pas vraiment un nouveau chez les indépendants, mais ces garde-temps sont toujours incontournables. Hajime Asaoka est une start de l’horlogerie japonaise depuis le premier jour où il a commencé à créer ces propres montres en 2005. En 2015, il devint membre de l’AHCI (Académie Horlogère des Créateurs Indépendants). Il produit la plupart de ses composants lui-même sauf les spiraux et ressorts de barillet. Tout est fait dans son minuscule atelier de Tokyo sur des machines vieilles du siècle dernier. Pas étonnant que sa production dépasse rarement 5 montres par an. Mais le plus frappant est sa philosophie de l’horlogerie. La manufacture d’une montre s’apparente à la résolution d’une équation mathématique ou à un jeu d’échec. Les meilleures solutions sont toujours les plus simples et bien souvent les plus esthétiques.
Son but est de créer les garde-temps les plus précis sans complexité apparente. Il s’efforce constamment de ne montrer aucun effort consenti. Une approche très japonaise.
Cette année, à Baselworld, il présente sa dernière réalisation: une déclinaison de sa Tsunami, 37mm de pure beauté intemporelle. Une trois aiguilles avec petite seconde. Pure comme un katana japonais, avec des accents Art Déco: le chemin de fer précis de minutes, la police épurée des index, la forme des aiguilles, l’équilibre du cadran. Rien de superflu…mais tellement de détails quand on regarde de plus près. Le disque des secondes à 6 heures est troué délicatement pour marquer celles-ci avec précision. Tous les dixièmes trous sont enduits de peinture rouge. Peinture? Nooonn! Laque Urushi! Cette ancienne technique nippone confère une profondeur inégalée à chaque couleur du cadran: le noir intense du tour des heures, le chemin de fer blanc cassé des minutes, le gris foncé du centre, le gris clair du compteur des secondes et le rouge vif de son aiguille. Tous sont en laque Urushi!
Des couches sur des couches sur des couches, à chaque fois fraisées délicatement puis polies jusqu’à obtenir la teinte et la texture recherchées et que la surface devienne aussi dure que de l’émail. Une oeuvre d’Art. Et ne me lancez pas au sujet du mouvement et de son énorme balancier tenant le centre de la scène, inspiré des vieilles montres de poche US. Le calibre arbore sa propre interprétation des Côtes de Genève. Les finitions sont superbes et précises, anglées et polies. Je pourrais y passer des heures.
Mais comme le précise lui-même Hajime Asaoka : « l’intérêt de mes garde-temps ne peut se résumer à leurs finitions ». Sa philosophie est bien plus profonde. Il crée des montres précises et rares pour toucher à l’essence de la nature universelle : une simplicité et une pureté pour exprimer la beauté intemporelle. Et ça marche.